C’est en présence de plusieurs membres du système judiciaire haïtien et de représentants d’organisations de la société civile que les responsables du Groupe d’appui aux rapatriés et aux réfugiés (GARR) ont réalisé ce forum sur la traite des personnes et le trafic d’êtres humains. « Notre objectif est de sensibiliser tous les acteurs et dégager une compréhension commune du phénomène », précise Jems Gédéon, avocat et membre du Chapitre haïtien de l’Association internationale des femmes juges, structure partenaire du forum.
Par la traite des personnes et le trafic d’êtres humains, les organisateurs entendent la domesticité des enfants (restavèk) ; le trafic de mineurs et d’adultes à la frontière haïtiano-dominicaine à des fins d’exploitation sexuelle ou d’exploitation de leurs forces de travail ; les enfants-soldats, enrôlés de force dans des gangs armés, exploités à leur insu et généralement sans rémunération ; ainsi que la mendicité forcée de jeunes enfants, exploités généralement par des adultes. Ces cas, si l’on en croit Jems Gedeon, seraient légion en Haïti.
Toute la journée durant, des intervenants se sont défilés et des ateliers ont été réalisés pour non seulement faire l’état des lieux du phénomène en Haïti et analyser ses conséquences, mais aussi pour permettre aux responsables des organismes de la société civile – ceux qui sont spécialisés dans la défense des droits humains au premier chef – de placer leurs mots dans le débat sur cette problématique.
À en croire les organisateurs de l’évènement, la situation est alarmante en ce qui a trait à la traite des personnes en Haïti. Selon Jems Gédéon, premier intervenant de la journée, celle-ci est facilitée par diverses causes structurelles. Du nombre, la pauvreté et, surtout, la faiblesse des institutions. À cela, s’ajoutent, selon l’homme de droit, l’absence de culture juridique et certaines habitudes ancrées dans les mœurs haïtiennes qui facilitent et font perdurer le phénomène.
Le traite des êtres humains perdure aussi à cause d’une autre réalité : l’impunité. Du moins, c’est ce qui ressort de l’intervention de la magistrate Marjorie Jacques. Selon la juge de siège, une armada d’instruments juridiques existe dans la législation haïtienne pour contrecarrer le phénomène. Elle cite en ce sens la loi du 2 juin 2014 contre la traite des personnes, le Code pénal, la Convention de Palerme, pour ne citer que ceux-là. Ce qui fait défaut, c’est l’application des prescrits de ces textes de loi.
Les intervenants ont donc appelé à agir pour freiner le phénomène. Dans son intervention en clôture de journée, la juge Lamise Elmidor a appelé – en usant de la règle des 4P pour lutter contre la traite des personnes – à la prévention des crimes, la protection des victimes et des personnes vulnérables, la poursuite des trafiquants et le partenariat entre les institutions étatiques et les organismes de la société civile pour contrecarrer le phénomène.
L’organisation de ce forum est un prétexte, si l’on en croit les responsables du GARR, pour lancer un plaidoyer contre la traite des personnes, domaine dans lequel la structure a déjà travaillé par le passé. Dans cette optique, selon le responsable de programme de l’institution, Junior Joseph, les propositions faites par les participants lors des ateliers serviront à « élaborer le plan de plaidoyer visant à sensibiliser tous les acteurs autour de cette problématique ».


