Le drame d’un mineur haïtien à Jimani : 14 mois de prison sans jugement
Le 23 juillet 2002, Tonton Pierre, 15 ans, fraîchement sorti de prison, s’est confié à un juriste du GARR sur les circonstances entourant son arrestation et sa détention prolongée et abusive.Le 18 mai 2001, Tonton Pierre circulait à moto, à Jimani, quand il a eu un accident sur la route impliquant deux dominicains: un chauffeur de minibus et un motocycliste. Le minibus dont le chauffeur, aux dires de lâ€adolescent, était en état d’ébriété, percuta la moto du dominicain, ce qui provoqua un télescopage avec son engin. Le motocycliste dominicain y laissa la vie et Tonton Pierre fut grièvement blessé. Il a été conduit en prison et son état a nécessité une hospitalisation qui a duré 5 jours. Il avait été, également, interrogé par la police dominicaine.Le 7 juillet 2001, l’adolescent avait été entendu par un juge à Jimani qui avait exigé une caution de 2000 pesos pour sa libération. «Si tu n’as personne pour payer cette somme, tu resteras en prison » lui avait, alors, lancé le juge. Le chauffeur du minibus, pour sa part, n’a jamais été inquiété, souligne Tonton Pierre.Le 9 juillet 2002, à la suite des interventions de l’avocat dominicain, Dr Esteban Sanchez,l’adolescent a été nouvellement entendu par-devant un juge, toujours à Jimani. Le GARR et la Pastorale Haïtienne à Barahona ont contribué au versement de ladite caution et l’adolescent a pu ainsi, au bout de 14 mois de détention illégale, recouvrer sa liberté.Tonton Pierre affirme n’avoir pas été frappé pendant sa longue incarcération. Cependant, il a été contraint, à diverses reprises, à certains travaux comme le chargement du charbon confisqué par les autorités ou encore des tâches plus dures comme celle de creuser des fosses pour la mise en terre de barres de fer ou le rangement de ces matériaux lourds.L’adolescent souffre de douleurs à l’oeil et précise que son mal n’a jamais été traité en prison. Son cas nécessite des soins urgents. « J’ai très mal aux yeux quand je suis au soleil » confie t-il.Le cas de Tonton Pierre n’est pas exceptionnel, à bien des égards. Il y a dans les prisons dominicaines un fort pourcentage d’Haïtiens jetés en prison sur les caprices d’un militaire ou l’arbitraire d’un agent des douanes ou de la migration. «Cette situation appelle une vigilance accrue des organisations de défense des droits humains à la frontière », avait souligné le Dr Esteban Sanchez, à la rencontre annuelle du Réseau binational Jeannot Succès de Défense des Droits Humains, tenue à Santiago, fin juin 2002.
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