
Une leçon du tremblement de terre du 12 janvier : « Il est de notre devoir de porter nos dirigeants à assumer leurs responsabilités ou de former de bons dirigeants pour qu’Haïti cesse d’être la propriété de quelques exploiteurs »
Au nom de toutes les femmes qui sont tombées le 12 janvier 2012, nous, organisations féministes réunies ici, accueillons cette marche comme une manière de dire que nous n’avons pas oublié. Nous n’avons pas oublié la lutte menée par ces femmes pour construire un pays où les femmes peuvent vivre dans la dignité. Nous n’avons pas oublié le combat des femmes pour un logement décent, nous n’avons pas oublié le fait que les femmes haïtiennes pour la plupart sont le pivot de leur famille .
Nous n’oublions pas la lutte des femmes pour l’émergence d’une Haïti où la décentralisation et la déconcentration et l’aménagement du territoire deviennent réalité ; car, si le territoire avait été aménagé, nous n’aurions pas enregistré toutes ces pertes en vies humaines. Ainsi donc, aujourd’hui, 2 ans après le tremblement de terre qui a englouti beaucoup, beaucoup de personnes, où les femmes sont tombées, où des jeunes sont tombés, il nous faut des dirigeants sérieux à la tête du pays ; des dirigeants qui ne s’attachent pas à agir dans le sens de leurs intérêts personnels à l’encontre du peuple car, nous constations que depuis de longues années, c’est une pratique courante, nous devons dire : Assez ! Trop, c’ est trop !
Nous ne pouvons pas gérer le pays de cette manière. Nous ne pouvons, après toutes ces morts, ne pas tirer une leçon. Aujourd’hui, c’est un moment de réflexion ou en même temps, nous saluons la mémoire de tous ceux-celles qui sont partis-es pour leur dire que nous gardons intact leur souvenir.
Nous devons assumer notre responsabilité comme peuple car au cours de ces deux années, des fonds importants ont été octroyés ou encore nous avions entendu parler de plusieurs milliards de dollars alors que la situation de la population, notamment des femmes reste bien celle que nous pouvons constater.
Nous ne saurions l’oublier et en mémoire de ces femmes qui sont tombées, il est temps pour nous de ressaisir.
Ce coin de terre où nous vivons depuis 400 ans, est a nous ; Nous ne pouvons pas continuer avec une équipe de dirigeants qui convertissent cette terre en un lieu d’enrichissement. Ce coin de terre est à nous, nous devons le protéger, nous devons l’embellir, et le convertir en un espace où nous pouvons vivre en toute sécurité. Quand nous parlons de sécurité, nous pensons à l’accès à un logement décent pour la population, notamment les femmes.
En leur mémoire, une nouvelle fois, nous disons, en mémoire d’Anne Marie Coriolan, de Magalie Marcelin, Myriam Merlet et toutes les femmes disparues lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010, ces femmes qui se battaient pour l’émergence d’une autre Haïti, nous disons oui, nous voulons une Haïti respectueuse des droits de la personne, respectueuse des droits des femmes, une Haïti où l’humain passe avant l’argent, avant les intérêts particuliers d’un individu, d’un ministre d’un parlementaire, c’est cette Haïti-là qu’il nous faut.
Ce 12 janvier 2012 doit être pour nous une opportunité pour continuer la lutte de sorte que ne se produise plus un autre 12 janvier dans ce pays et c’est notre responsabilité à tous et à toutes. Il est de notre devoir de porter nos dirigeants à assumer leurs responsabilités ou bien former de bons dirigeants capables de faire qu’Haïti, la terre de Dessalines, la terre de Catherine Flon, ne soit plus la propriété d’une poignée d’exploiteurs.
Il est important de relever aussi que le 12 janvier ne doit guère servir de prétexte à certains pour des élections, pour des promesses électorales. Aujourd’hui, nous les femmes qui commémorons le souvenir de nos luttes, la lutte menée par nos ancêtres hommes et femmes, nous nous engageons dans la lutte pour forcer nos dirigeants à assumer leurs responsabilités.
Plusieurs milliards de dollars sont gaspillés dans le pays alors que des déplacés-es continuent de vivre dans des conditions déplorables sous des tentes. Nous sommes convaincus que le peuple haïtien ne peut pas rester piégé dans des promesses électorales alors que des femmes continuent de subir toutes sortes de violences sous les tentes, où des déplacés sont perçus comme des délinquants. Nous devons combattre cette forme de discrimination.
Nous les femmes, nous voulons que la mémoire de ceux-celles qui sont tombés le 12 janvier 2010 soit honorée sans démagogie, est-ce pourquoi nous appuyons la marche du Collectif des Organisations qui défendent le droit au logement de la population, notamment des femmes ; car le problème du logement est structurel, et c’est par une réponse structurelle que nous trouverons la solution. Les autorités ne peuvent pas se contenter de distribuer quelques gourdes aux déplacés-es pour les déloger des camps sans qu’ils-elles ne sachent quoi faire après. Vivre sous un toit décent n’est pas une faveur mais un droit.
Nous de SOFA, exhortons toutes les organisations sociales à conjuguer leurs forces pour apporter une réponse au traitement infligé aux familles déplacées dans les camps où elles subissent des humiliations et les agressions de réactionnaires qui procèdent à leur expulsion forcée. Il est temps que les autorités cessent leur propagande politique avec la question des déplacés-es.
VIVE LA LUTTE DU PEUPLE HAITIEN !
VIVE LA LUTTE DES FEMMES !
Ce texte est l’un des nombreux messages délivrés par le Collectif des Organisations pour la Défense du Droit au Logement au cours d’une marche réalisée à Port au Prince, le 12 janvier 2012, pour honorer la mémoire de plus de 300 mille Haïtiens-Haïtiennes tués et de plusieurs centaines de milliers d’autres blessés lors du séisme du 12 janvier 2010. Le Collectif est composé de GARR, FRAKKA, PAPDA, POHDH, BATAY OUVRIYE, SJR-Haïti, DOP.
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