Oui au travail décent, non à l’esclavage moderne
En tant qu’organisation de promotion et de défense des droits des travailleurs migrants, le GARR se sent interpellé par le débat en cours autour de la loi sur le salaire minimum votée par les deux branches du Parlement haïtien.La situation engendrée par le vote de cette loi contre laquelle le président de la République a fait objection, met à nu la complicité de l’Etat dans la violation systématique des droits d’une catégorie de travailleurs, parmi les plus pauvres du pays. En effet, en dépit de l’inflation galopante, l’Etat, qui pourtant doit garantir la protection des droits des travailleurs, ne s’est jamais préoccupé d’ajuster leurs salaires, malgré les prescrits du Code du travail. Non plus, il n’a adopté de mesures d’accompagnement face à la montée vertigineuse du prix du transport, de la nourriture, du loyer, de la scolarité des enfants etc. Au contraire, les dirigeants de l’Etat ont préféré s’associer aux patrons pour faire porter par la main d’œuvre déjà sous-payée toutes les augmentations de coûts, sans se soucier de leurs conditions de vie qui n’ont cessé de se détériorer. En plus, cet Etat a continué à effectuer des prélèvements sur les maigres salaires des ouvriers et ouvrières, à travers un système de ponction comme l’ONA (Office National d’Assurance Vieillesse), sans aucune offre sérieuse de service en retour. Pire, leurs dépôts détournés contribuent à enrichir les amis du pouvoir et malgré le récent scandale qui a éclaboussé cet organisme, aucun plan de redressement n’a été annoncé.Peut-on parler aujourd’hui de travail quand un ouvrier touche un salaire qui ne lui permet même pas de s’alimenter convenablement? Les conditions de travail dans certaines entreprises haïtiennes aujourd’hui en 2009 peuvent être qualifiées sans ambages d’esclavage moderne et il est regrettable que de telles situations perdurent avec la participation des plus hautes autorités de l’Etat. Sans un emploi décent pouvant répondre à leurs besoins, des milliers d’Haïtiens/Haïtiennes se tournent vers la frontière ou vers la mer en quête de mieux-être. Refoulés ou déportés, ils-elles reviennent plus pauvres qu’avant leur départ ; et leur réinsertion sera toujours irréalisable sans des opportunités de travail qui les gardent loin du cercle de la pauvreté.Rappelons que plusieurs instruments internationaux, dont ceux de l’OIT, insistent sur la nécessité pour les Etats de créer des conditions décentes de travail de manière à permettre aux travailleurs/euses d’accéder à un emploi et à une juste rémunération, à jouir de droits, de moyens d’expression et de reconnaissance, à bénéficier d’une stabilité familiale et d’un développement personnel de justice et d’égalité entre les sexes. « Ces diverses dimensions du travail décent sont les fondements de la paix dans les communautés et la société », selon l’OIT. En choisissant des procédés dilatoires pour le maintien d’un salaire dérisoire, l’Exécutif haïtien renonce à son devoir de protection et à sa responsabilité dans la recherche de propositions alternatives pour sortir le pays de ce cycle d’emplois misérables. Il contribue ainsi à renforcer les tensions et les clivages sociaux au détriment de la Paix et de la Stabilité.A ce carrefour difficile de l’histoire du pays, le GARR reste solidaire de tous ceux et celles qui veulent briser le cercle de la pauvreté en Haïti, et appelle à cette équité minimale en soutenant la publication de la loi fixant le salaire minimum à 200 gourdes, telle que votée par le Parlement haïtien. Le GARR appuie également l’idée d’un système véritable de sécurité sociale et la mise en place de mécanismes d’inspection du travail par le Ministère des Affaires Sociales pour pallier à tout effet pervers découlant de la publication de ladite loi.{{Pour le Conseil d’Administration du GARR}}{{Serge LamothePrésident}}
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