Pasaj : un documentaire-plaidoyer pour des échanges commerciaux respectueux des droits des femmes à la frontière
Ce documentaire d’environ 30 minutes évoque la situation des femmes commerçantes qui se retrouvent au cœur de la problématique des droits humains dans les marchés frontaliers. Un ensemble de 8 points de la frontière haïtiano-dominicaine s’ouvrent au moins 2 fois par semaine à des échanges commerciaux intenses entre les deux peuples et l’affluence de ces marchés bi-hebdomadaires est estimée à plus de 10 mille usagers en provenance d’Haïti. Environ 70% des personnes qui participent à ces échanges binationaux sont des femmes qui viennent de toutes les régions du pays.Anide Joazard et Rosette Santana sont les deux principales figures féminines de « Pasaj » réalisé par le vidéaste belge Pieter Van Eecke du Groupe Medialternatif, assisté de l’Haïtienne Evelyne Sylvain. Dans la vie, Anide est commerçante au marché binational de Dajabon et Rosette à celui d’Anse-à-Pitres. Elles racontent, tour à tour, les mille-et-une vicissitudes qui parsèment leur trajet jusqu’aux marchés frontaliers qualifiés à tort, selon elles, de marchés binationaux, car ils fonctionnent pour la plupart sur le territoire dominicain et sans aucune considération pour l’usager haïtien. Les femmes commerçantes, dans leur grande majorité, ne possèdent pas de capitaux propres et sont la proie d’usuriers auxquels elles doivent verser des taux d’intérêt exorbitants. Leurs marchandises sont régulièrement pillées ou tout bonnement jetées par des militaires, policiers ou civils dominicains, expliquent Anide et Rosette qui rapportent également les abus commis du côté haïtien et par les douaniers des deux pays. Il n’est pas rare que des commerçantes soient victimes de bousculades, bastonnades, et même de viols. Aucune structure n’est disponible à la frontière pour recevoir leurs plaintes. Par ailleurs, les commerçantes haïtiennes sont considérées «comme des migrantes temporaires et tombent sous le coup des lois dominicaines qui régissent la migration» a expliqué la coordonnatrice du Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR), lors de la grande première de « Pasaj » à la mi-décembre, à Port-au-Prince. En cette occasion, l’actrice Anide Joazard avait fait le déplacement de la ville frontalière de Ouanaminthe à la capitale haïtienne avec son mari et leur nouveau-né. « Je voudrais que ses images sur les marchés frontaliers portent l’Etat haïtien à assumer ses responsabilités » avait déclaré l’actrice-commerçante en berçant chaudement son bébé sous les regards attentifs des spectateurs réunis à l’auditorium de la FOKAL.Pour sa part, le Pasteur Kerby Gaston, membre du Conseil d’Administration du GARR, a estimé qu’à travers cette réalisation, « La sensibilisation sur la situation des droits humains dans les marchés frontaliers s’amplifie». Soulignons que le documentaire « Pasaj » concrétise une initiative du Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR) dans le cadre de ses activités de sensibilisation et de plaidoyer sur la dure réalité des marchés frontaliers. {{{Des recommandations}}} A la fin de la projection, la coordonnatrice du GARR avait lu un ensemble de recommandations produites dans le cadre d’une formation organisée à la frontière par des multiplicateurs et multiplicatrices en droits humains sous le thème : «Les femmes dans les échanges transfrontaliers».Ces recommandations sont adressées à l’Etat haïtien auquel les participants-es demandent : de construire des marchés sur le territoire et favoriser des échanges binationaux réels avec la tenue alternative de ces marchés en Haïti et en République Dominicaine ; de veiller à la sécurité durant leur fonctionnement ; de préciser les taxes à payer ; d’assainir l’aire des marchés et y installer des unités de premiers soins ; de voter une législation sur le commerce frontalier ; de conclure avec la République Dominicaine un accord commercial fixant les conditions de fonctionnement des marchés.Il est également demandé aux autorités haïtiennes de neutraliser les groupes dénommés « casques bleus » auteurs d’agressions répétées contre les commerçantes ; d’octroyer des facilités de crédit aux femmes ; d’exercer un meilleur contrôle sur les marchandises qui arrivent en Haïti, par la frontière, en particulier à Anse-à-Pitres transformé en une décharge de vêtements usagés appelés « pèpè » ; d’installer un bureau de résolution de conflits à la frontière et enfin d’établir des représentations consulaires haïtiennes à Elias Piňa et à Jimani où se tiennent des échanges commerciaux importants. Pour voir le reportage video, cliquez…
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